Croyez-vous au Père Noël ?
Non, n’est-ce pas.
Et pourquoi ?
Vous avez passé de tendres années à imaginer qu’un vieux bonhomme parcourait le monde sur un traineau volant et qu’en une nuit, il pouvait distribuer des cadeaux au pied de milliards de sapins en se faufilant par la cheminée. Mais un jour, vous avez commencé à douter.
Vos copains d’école vous ont dit “c’est les parents”.
Vos parents n’ont pas été capables de démontrer l’existence du vieux en rouge.
Et ils ont fini par admettre que oui, c’est eux.
Noël n’a plus jamais eu la même saveur.
Et vous avez cessé de prendre les promesses pour argent comptant.
Désormais, vous ne croyez pas les gens sur parole.
N’est-ce pas ?
Pourquoi pensez-vous qu’il en aille autrement pour vos clients ?
La confiance, ça se mérite
Trop d’entrepreneur pensent qu’il suffit d’exécuter une idée géniale pour faire accourir les clients, les investisseurs et les partenaires.
Trop d’entrepreneurs sont persuadés que les réactions enthousiastes de leur entourage suffisent à valider la pertinence d’un produit.
Trop d’entrepreneurs sont tétanisés à l’idée d’aller parler à des vieux et préfèrent vendre aux Ehpad, collectivités locales ou mutuelles en espérant contourner le problème. Syndrome généralisé chez les entrepreneurs qui “viennent du B2B”.
Trop d’entrepreneurs surestiment la taille de leur marché et se rassurent en s’abstenant de la mesurer.
Trop d’entrepreneurs pensent qu’ils n’ont aucune concurrence et ne comprennent pas que si leur marché se passe allègrement d’eux depuis des lustres, c’est grâce au service d’un concurrent très bien implanté.
En un mot : ces entrepreneurs sont incapables de prouver la pertinence de leur solution aux clients, aux investisseurs, aux parties prenantes.
Et pourtant, ce n’est pas faute de leur répéter.
Ici, je l’ai déjà expliqué dans cette newsletter publiée en mars 22
Ailleurs, je vous invite à découvrir le livre blanc sur la preuve que nous avons réalisé pour AG2R
Romain Ganneau est le responsable Autonomie et Services chez AG2R LA MONDIALE. Il est aussi l’organisateur de la réunion des labs. Un club qui réunit les meilleurs experts français de la preuve de concept dans la Silver économie.
En février dernier, Romain nous a commandé une étude consacrée à la preuve de concept sur le marché des seniors.
Nous avons interviewé les 10 experts de la réunion des labs pour recueillir leurs idées et témoignages sur ce sujet.
Nous avons compilé ces travaux dans un dossier d’une dizaine de pages.
AG2R l’a rendu public le 12 septembre dernier, à Cannes, durant le Silver Economy Festival organisé par On Medio (Jérôme Pignez).
Afin de vous donner un avant goût du livre blanc, je vous propose d’en découvrir la 2ème partie, consacrée à la preuve.
La preuve centralisée ?
La question de la preuve est au ♥️ des réflexions de la Silver économie, qui bûche sur la création d’un centre national de preuve, organisme public censé devenir l’autorité suprême en matière de preuve de concept, dans un but de simplification et de rationalisation.
Ces tentatives de centralisation des contrôles sont peut être louables sur le plan des finances publiques, mais elles manquent souvent d’agilité et leur efficience dépend de la qualification des experts qui la composent.
En outre, un tel organisme peut être tenté de réinventer la roue en organisant des études nationales onéreuses plutôt que d’aller rechercher des preuves de concept dans la littérature scientifique, qui a bien souvent déjà validé ou invalidé les concepts.
Les limites du centralisme
D’autre part, chaque Département ou Région ne va pas avoir le même niveau de maturité ou les mêmes dimensions géographiques ou socio-démographiques, ce qui appelle des solutions différentes. Cela nécessite une organisation nationale et locale, et c’est ce qui est voulu par la CNSA via la création de son centre national de preuves.
Le centre de preuve sera efficace à condition d’agir au niveau national et local, de façon complémentaire. Un centre national va donner un cadre, un cahier des charges qui pourra être mis en place au niveau local, avec des gérontopôles, clusters, living labs, qui devront être son bras armé.
Le centre national éviterait la démultiplication des expérimentations locales pour une entreprise qui chercherait à se développer sur plusieurs territoires.
Le centre de preuves doit amener des solutions plus cadrées, donner des critères qui seront considérés comme structurants par les entrepreneurs. et pour la filière. (Paul Durand / Chargé de mission pour le Cluster d’Occitanie)
Les atouts locaux
Au niveau local, les gérontopôles ne pourront jouer un rôle efficace qu’à condition d’intégrer toutes les parties prenantes, condition sine qua non pour étudier les 3 niveaux de preuves.
A l’échelle d’une Région, les expérimentations peuvent se déployer dans plusieurs configurations d’habitat (urbain, rural, touristique, agricole, etc.) et mobiliser des cohortes variées, ce qu’un centre national ne pourrait pas faire, courant le risque de solliciter toujours les mêmes experts, les mêmes panels pour réaliser son analyse... et donc de délivrer un résultat biaisé et peu exploitable.
Demain, s’il faut 10 Ehpad pour tester une solution, dans les cinq minutes qui suivent je les ai. (Murielle Bouin / DG du Gérontopôle de Nouvelle Aquitaine)
Le centre de preuves devrait donc limiter la boulimie de production d’études sans que personne n’en consolide les résultats.
Il devrait être en capacité de consolider les travaux antérieurs et futurs. Nombre de structures réalisent déjà des études. Et les éléments dont elles disposent sur une technologie ou un usage sont complémentaires.
Il devrait collecter et compiler ces données afin d’en faire un outil utilisé par l’écosystème. Il ferait un travail de consolidation plutôt que de réalisation d’études supplémentaires... et superflues.
L’évaluation ne porte pas que sur un capteur de chute, ou un système d'actimétrie. C'est plus compliqué que de mesurer seulement l'efficacité de ce produit. On doit démontrer que le dispositif s’intègre dans toute la chaîne de l'accompagnement. Et c'est cette chaîne qui est efficace et efficiente. (Véronique Chirié / DG du TASDA)
Rendre la preuve publique
Si des acteurs publics financent des études d’impact, elles devraient être publiées. De même, les preuves d’affaire sur les différents modèles devraient être rendues publiques et mises en valeur. Tout ce qui peut faire gagner du temps aux entrepreneurs devrait être accessible.
Innover c'est une chose, mais donner la possibilité aux institutionnels de s'emparer de cette innovation, ce n'est pas évident. (Murielle Bouin)
La preuve permet d’informer et d'orienter sur les solutions qui fonctionnent et sont éprouvées. Par exemple, pour les collectivités, cela permettra de guider les commandes publiques, flécher les investissements et les aides sur les solutions qui marchent et éviter la dispersion.
Vous avez besoin d’accéder à des expertises fiables pour structurer vos projets. Nous constatons que des entrepreneurs ayant bénéficié d’aides financières peuvent rencontrer des problèmes pour se développer lorsqu’ils ne savent pas comment faire, ni comment organiser des tests à grande échelle afin de mesurer l’impact de leur solution.
En choisissant de rendre publics nos résultats d’expérimentations, nous contribuerons à l’accélération du développement de solutions pertinentes. (Romain Ganneau).
La semaine prochaine
Je vous ferai un petit topo sur l’habitat alternatif en analysant un rapport de l’ONU qui cogne sur le modèle de SAAD dédié. Je ferai un croisement avec une étude complète consacrée au coliving et parue dans Les Echos la semaine dernière.
Je trouve ce parallèle intéressant car il montre l’émergence d’un modèle en vogue et plebiscité par les promoteurs (le coliving) et la difficulté d’un autre modèle à exister.
Passez une bonne semaine !