L'habitat inclusif décolle enfin ! Le pouvoir insoupçonné des partenariats dans le logement social
La nouvelle vague de projets concertés qui brise les silos et ouvre la voie à un modèle d'habitat véritablement inclusif
Bienvenue sur Longévité où j'analyse l'écosystème de la Longévité et les acteurs qui y font avancer le schmilblick.
De retour d'un colloque passionnant sur l'habitat senior en Île-de-France, je dois reconnaître une prise de conscience : j'avais sous-estimé le rôle fondamental des bailleurs sociaux dans le développement de l'habitat inclusif.
En préparant ma table ronde et en échangeant avec des directeurs de l'autonomie, des représentants de bailleurs sociaux et des gestionnaires de résidences, j'ai découvert tout un pan d'initiatives remarquables qui méritent votre attention.
Ce que je m'apprête à partager avec vous n'est pas dans les médias grand public, ni même dans la plupart des publications spécialisées. Il s'agit de modèles innovants, construits sur des partenariats solides, qui réinventent l'habitat pour seniors et personnes en situation de handicap. Des solutions qui émergent discrètement mais efficacement au cœur du parc social.
Vous allez découvrir avec moi une nouvelle facette des projets d'habitat inclusif et je vous aiderai à répondre à LA grande question :
Comment créer des habitats inclusifs qui répondent - à coup sûr - aux besoins d'un territoire ?
Depuis 2017, j'explore les facettes de l'habitat inclusif, mais je dois reconnaître une forme d'aveuglement dans mon analyse : je me suis principalement concentré sur les projets privés commerciaux et les entrepreneurs voulant tout gérer de A à Z.
J'ai sous-estimé le rôle des bailleurs sociaux, alors même qu'ils sont les pionniers de ce modèle. Cette prise de conscience s'est cristallisée lors du colloque de la Corerpa sur l'habitat senior en Île-de-France du 11 avril dernier, où j'ai animé une table ronde réunissant directeurs de l'autonomie des conseils départementaux, bailleurs sociaux et gestionnaires de résidences.
Ce colloque, coordonné par Christiane Flouquet (membre de la Corerpa, du Ceser Ile-de-France, du CDCA 92 et ancienne directrice de l'Action sociale de la CNAV Île-de-France), a rassemblé environ 150 participants - moitié retraités représentant les CDCA franciliens, moitié acteurs du logement social, élus et représentants départementaux.

Une rencontre révélatrice d'un écosystème que je n'avais pas suffisamment exploré.
Les bailleurs sociaux : des acteurs historiques pourtant discrets
Repenser mon angle d'approche m'a rappelé que les premiers projets d'habitat inclusif étaient portés par des associations et des CCAS en partenariat avec des bailleurs sociaux. Dès 2017, c'est à ces derniers que la CNSA s'adressait dans son guide pratique. La loi ELAN de 2018 et le rapport Piveteau-Wolfrom de 2020 les identifient aussi comme les donneurs d'ordre privilégiés pour ces projets.
Pourtant, sur le terrain, leur implication semblait floue. Plusieurs acteurs du logement social m'avaient même confirmé leur faible intérêt, évoquant la taille trop réduite de ces projets par rapport à leurs programmes habituels.
La situation évolue, avec des projets intéressants se développant dans ce secteur.
Outre le traditionnel habitat inclusif qu’on ne présente plus, ces programmes développent des résidences autonomie, des logements intergénérationnels ainsi que des formules mixant plusieurs approches ou intégrant des logements pour personnes fragiles au sein de structures “grand public”.
Exemple : résidence “Les Dirigeables” de Montesson
Par exemple, la résidence “Les Dirigeables” à Montesson est une résidence intergénérationnelle portée par le bailleur Sequens (Action Logement) dont certains logements sont réservés par la Fondation Leopold Bellan pour des personnes vieillissantes en situation de handicap psychique. Pour l’animation, outre la fondation Bellan, Sequens s’est associé à une association spécialisée (Yes Akademia).
Le projet a été monté en lien avec la ville de Montesson et le département des Yvelines dans le but de :
Créer un lieu de vie intergénérationnel tout en répondant aux besoins de logements sociaux pour les familles et personnes modestes - fiche pratique Affil.
Aller plus loin
Je vous propose de découvrir mieux ces projets en suivant les recherches que j’ai faites moi-même en préparation du colloque Corerpa. Pour ce faire, j’ai étudié les travaux réalisés par l’Affil (Association Francilienne pour Favoriser l'Insertion par le Logement) sur l’habitat inclusif dans le parc social.
Depuis 2022, cette association s’est penchée sur l’habitat inclusif. elle a produit de nombreux très bons contenus dont un livre blanc et dix fiches pratiques sur des projets franciliens. Vous retrouvez ces contenus sur la page habitat inclusif du site web Affil. Et je vous en propose, quant à moi, une analyse synthétique.
Des modèles partenariaux innovants
L'étude des projets montre une caractéristique commune : ils reposent sur des partenariats multiples où chaque acteur apporte son expertise. En analysant ces dix cas franciliens, plusieurs modèles de montage émergent :
Initiative du bailleur social en partenariat avec une association d'animation
C'est le modèle le plus fréquent : un bailleur social (1001 Vies Habitat, Seqens, Batigère Habitat, Antin Résidences) s'associe à une association spécialisée dans l'animation et la création de lien social (Récipro-Cité, APES/Yes Akademia, AMLI, VYV 3/ALFI, Vivre et Devenir).
Dans ce schéma, le bailleur apporte son expertise immobilière et son assise financière, tandis que l'association conçoit et pilote le projet social. Des exemples comme la résidence Chers Voisins à Lieusaint, l'Espace Canal à Noisy-le-Sec ou Les Toits de France au Pré-Saint-Gervais témoignent de la pertinence de cette approche.
Association spécialisée dans l'accompagnement de publics spécifiques + bailleur social
Ici, une association experte dans l'accompagnement de personnes en situation de handicap (Fondation Falret, ARS95) ou de personnes âgées (Habitat et Humanisme, Le Pari Solidaire Groupe SOS Seniors) s'associe avec un bailleur social (ICF Habitat, AB Habitat, Paris Habitat).
Les colocations de la Plateforme Habitat Accompagné 94 (Fondation Falret) ou La Maison d'Aspasie à Arcueil (Habitat et Humanisme) illustrent cette démarche où l'association porte le projet d'accompagnement tandis que le bailleur met à disposition les logements.
Projet développé sur un patrimoine existant du bailleur
Certains projets prennent forme au sein de résidences sociales existantes, souvent suite à une réhabilitation. Le bailleur identifie le potentiel du site, une association intervient pour créer une dynamique sociale, et les habitants existants sont intégrés dans la démarche. La résidence Croulebarbe à Paris 13e en est un exemple éloquent.
Projet initié par la collectivité territoriale
Dans ce modèle, la commune ou l'intercommunalité est à l'origine du projet, dans une logique de cohésion sociale. La résidence Les Closbilles à Cergy illustre ce cas de figure, où la ville a exprimé un besoin auquel le bailleur a répondu.
Les freins actuels au développement
Malgré ces initiatives prometteuses, plusieurs obstacles ralentissent encore le déploiement à plus grande échelle :
Des limites économiques et financières
L'AFFIL identifie plusieurs points de blocage :
L'absence de financements fléchés pour la construction et l'aménagement des espaces communs
Un financement fragile de l'animation et de la coordination, avec une Aide à la Vie Partagée (AVP) qui ne couvre pas tous les besoins
Des coûts de fonctionnement importants qui restent à la charge des porteurs de projet
Pour les résidences intergénérationnelles, le manque de financements spécifiques est un frein majeur. Ces structures fonctionnent généralement sur les fonds propres des bailleurs, complétés par des financements ponctuels de partenaires.
Des difficultés opérationnelles
La captation de logements est un point de blocage, notamment à Paris où des projets n'ont pas abouti faute d'opportunités foncières identifiées. L'AVP ne finance pas l'investissement dans les logements, et les Départements peinent à financer la captation et les travaux d'adaptation.
La transversalité inhérente à ces projets se heurte au cloisonnement des politiques publiques, tandis que le recrutement et la formation des professionnels d'animation constituent un autre défi majeur.
La coordination : clé de voûte du développement futur
L'analyse de ces projets révèle un constat fondamental : nous disposons de l'expertise technique, nous connaissons les besoins du terrain, et les parties prenantes sont prêtes à s'engager. Ce qui manque, ce sont des compétences transversales de coordination et d'organisation.
Un besoin de chefs d'orchestre
Le succès des projets repose sur leur capacité à faire dialoguer des univers distincts : logement social, action sociale, santé, collectivités territoriales. Ce dialogue ne s'improvise pas et nécessite des professionnels capables de comprendre les contraintes et objectifs de chaque acteur.
Certains réseaux d'accompagnement à domicile ont développé cette expertise en interne, par leur implication dans de multiples projets. Un acteur de ce secteur témoigne que son organisation coordonne actuellement une douzaine d'opérations d'habitat inclusif, chacune avec ses spécificités et ses défis.

L'intervention de ces structures expertes dès la genèse des projets permet d'éviter de nombreux écueils. "L'ingénierie sociale peut aller vite dès lors qu'on s'appuie sur un partenaire expérimenté," confie un professionnel du secteur. L'expertise apportée permet notamment :
D'anticiper les contraintes réglementaires avant que des choix irréversibles ne soient faits
De définir précisément les profils d'accompagnement nécessaires et les modalités d'intervention
De prendre en charge les relations avec les organismes financeurs (MDPH, Conseils départementaux)
D'adapter l'accompagnement aux besoins spécifiques de chaque résident
Un acteur majeur du secteur me confiait récemment : "Notre approche consiste à ne pas avoir de méthode préétablie. Si nous voulons adapter le projet en fonction de chacun, nous devons rester ouverts et créatifs, ne pas débarquer avec une grille unique." C'est justement cette adaptabilité qui fait de ces coordinateurs des maillons essentiels du dispositif.
Vers un modèle exportable
Si un modèle fait ses preuves en Île-de-France, comment l'exporter vers d'autres régions ou les territoires ultramarins ?
La question est cruciale, car ces territoires présentent souvent des spécificités qui nécessitent une adaptation du modèle. Mayotte, par exemple, n'a pas encore d'EHPAD et pourrait bénéficier de solutions alternatives comme l'habitat inclusif, à condition d'adapter le concept aux réalités locales.
Pour favoriser cette "transférabilité", plusieurs pistes peuvent être explorées :
Documenter précisément les modèles qui fonctionnent, comme le fait l'AFFIL
Développer des guides méthodologiques à destination des territoires
Former des "ambassadeurs" capables de porter cette expertise vers d'autres régions
Créer des plateformes d'échange de bonnes pratiques entre territoires
Des convergences et des distinctions à clarifier
La distinction entre habitat inclusif et résidences intergénérationnelles n'est que le dernier sursaut d'une problématique plus large de qualification des modèles. En effet, la loi ELAN a clarifié le sujet concernant l'habitat inclusif, permettant ainsi aux différents porteurs de projets de faire avancer leurs demandes auprès des autorités plus rapidement.
Cependant, cette structuration peut être contraignante, ce qui amène certains porteurs de projets à décider de ne pas se mettre en statut d'habitat inclusif pour être plus libres de leurs mouvements dans la création de leur projet.
Entre cadre normatif et liberté d'innovation
L'habitat inclusif bénéficie d'un cadre réglementaire établi (loi ELAN, cahier des charges national) et d'un financement dédié via l'AVP, tandis que les résidences intergénérationnelles n'ont pas de cadre réglementaire spécifique et manquent de financements dédiés à l'animation.
Cette distinction est importante car elle conditionne les modèles économiques et les partenariats à construire.
Le problème que rencontrent aujourd'hui les résidences intergénérationnelles qui n'ont pas un statut et donc des aides fléchées, on va le retrouver dans différents projets qui vont être confrontés à la même difficulté.
La question qui se pose est cruciale : faut-il trouver un système qui permet de bénéficier d'aides extérieures ou plutôt un système qui permet de s'équilibrer financièrement sans avoir recours aux aides extérieures ?
Dans le deuxième cas, il n'est pas nécessaire de rentrer dans une case, une catégorie définie, à condition de respecter le droit commun.
La problématique qui peut se poser étant celle de l'accueil des personnes vulnérables, là il est logique d'imposer au porteur de projet un cadre strict afin de protéger les personnes qu'il accueille.
Vers des modèles hybrides et innovants
Cependant, la limite de l'exercice, c'est qu'à force de vouloir trop codifier les catégories les unes après les autres, on coupe un peu les ailes aux entrepreneurs qui voudraient inventer des projets adaptés spécifiquement aux particularités du terrain.
On voit émerger des modèles hybrides comme la résidence autonomie couplée à une colocation intergénérationnelle, ou l'habitat inclusif intégré dans du diffus, ou bien des mix qui n'ont pas encore été imaginés, mais qui pourraient répondre à des besoins spécifiques liés aux particularités du terrain ou à l'évolution de la population ciblée.
De nombreuses questions n'ont pas encore été abordées et vont probablement se présenter dans les années qui viennent compte tenu de la diversification des problématiques.
Pensons par exemple aux situations des personnes vieillissantes qui parlent mal le français, notamment quand elles ont des troubles neurodégénératifs et qui pourraient avoir besoin d'un accueil plus communautaire que ce que propose aujourd'hui l'écosystème.
L'enjeu est donc de trouver le juste milieu entre une réglementation qui va protéger et encadrer, et une certaine liberté de mouvement qui permet aux porteurs de projets et aux collectifs qui se forment autour de ces projets de construire des offres qui correspondent véritablement à la demande.
Perspectives : un changement d'échelle encore à construire
Si l'analyse des projets franciliens montre des initiatives prometteuses d'habitat inclusif dans le parc social, la réalité observée lors du colloque de la Corerpa du 11 avril dernier invite à une certaine prudence.
Les participants à la table ronde ont validé qu'il reste encore beaucoup à faire.
Une appropriation encore inégale par les bailleurs sociaux
Si certains bailleurs sociaux se sont engagés volontiers dans ces projets, ils restent minoritaires. Plusieurs bailleurs ne manifestent pas d'intérêt particulier pour ce format, n'en développant pas du tout ou sous-traitant la conception et la gestion à des délégataires tiers sans vouloir s'impliquer véritablement.
Or, l'intérêt des modèles évoqués lors de la table ronde réside dans leur intégration fine dans le parc social, et non comme des "pièces rapportées" gérées par des tiers - comme ce fut longtemps le cas pour les résidences autonomie et les EHPAD, construits en périphérie pour des raisons pratiques (et parce que le foncier coûte moins cher derrière la gare de tri qu’en face de la mairie). L'enjeu serait plutôt de développer des modèles intégrés et ouverts qui répondent à des spécificités locales très fines, ce qui est précisément l'orientation des projets documentés dans les fiches pratiques de l'AFFIL.
À l’issue de cette réflexion, je voudrais vous faire percevoir une prise de conscience du phénomène de vieillissement, certes, mais qui reste timide. Elle doit être accompagnée pour devenir plus accessible. Et comment ?
Par exemple, en promouvant au maximum les modèles actuels pour montrer le champ des possibles.
Et surtout, en ne les montrant pas comme des idéaux inaccessibles ou tellement atypiques qu’ils ne vont intéresser qu’une poignée de citoyens, mais comme une nouvelle norme sociale envisageable et désirable.
Vers une diversification des porteurs de projets
Les retours d'expérience partagés par les Directions de l’Autonomie des Conseils départementaux des Hauts-de-Seine (92) et de Seine-Saint-Denis (93), présents à la table ronde montrent que l'enjeu n'est pas tant de promouvoir des modèles portés uniquement par les bailleurs sociaux, mais de soutenir une diversité de porteurs : acteurs associatifs, CCAS, acteurs commerciaux, et bailleurs sociaux.
Le CD92 a mentionné des projets initiés par des acteurs privés commerciaux qui, pour certains, se sont associés à des bailleurs sociaux ou des associations gestionnaires, tandis que d'autres ont trouvé d'autres montages en fonction des spécificités territoriales.
L'avenir repose donc sur le développement de modèles variés portés par des collectifs constitués de différentes parties prenantes. Ni les bailleurs sociaux ni les acteurs commerciaux ne peuvent tout faire seuls.
Une nécessaire cartographie des écosystèmes
Pour ce changement d'échelle réussi, l'enjeu principal reste une bonne interconnexion entre les acteurs. Cela suppose une cartographie précise des écosystèmes locaux et l'émergence de porteurs de projets transversaux capables de "mettre en musique" les différentes initiatives en fonction des besoins territoriaux.
Pour accélérer ce développement, trois chantiers prioritaires semblent se dessiner :
Renforcer les compétences de coordination : valoriser les structures capables de monter des projets complexes, créer des référentiels et former des professionnels capables de faire dialoguer les différentes parties prenantes et de conduire ces projets complexes
Stabiliser le modèle économique : clarifier et pérenniser les financements de l'AVP, tout en explorant des solutions moins tributaires de l’impôt et de la CNSA pour faire tourner ces logements.
Capitaliser sur les expériences réussies : documenter les projets qui fonctionnent et créer des outils de transfert de compétences vers d'autres territoires : un passage au JT ne suffit pas !
Pour une définition plus souple de l'habitat inclusif
Un défi majeur freine encore le développement de solutions innovantes : la définition trop restrictive de l'habitat inclusif dans les textes réglementaires.
"Aujourd'hui, notre définition de l'habitat inclusif est trop centrée sur une maison collective. Beaucoup de gens vont penser à une maison de neuf colocataires dans un petit village alors qu'on peut donner une définition plus ouverte," témoigne un professionnel du secteur.
Cette vision étriquée exclut des projets pourtant pertinents : les initiatives accueillant plus de personnes, les dispositifs mixtes (personnes âgées et personnes en situation de handicap), ou encore les formules d'habitat diffus où les résidents sont répartis dans plusieurs appartements d'un même quartier.
De plus, l'application variable des règles d'un département à l'autre crée une inégalité territoriale et une incertitude pour les porteurs de projet. "Nous ne pouvons jamais être sûrs que des modalités dont nous avons bénéficié sur un projet seront réplicables dans un département différent," souligne un acteur impliqué dans plusieurs régions.
Pour libérer la créativité des porteurs de projet, il faudrait sans doute repenser la gouvernance de l'habitat inclusif au niveau national, en garantissant un socle commun d'application sur tout le territoire, tout en permettant des adaptations aux contextes locaux.
Conclusion : l'orchestration, nouvelle valeur sur le marché de l'habitat inclusif
Ce tour d'horizon des projets d'habitat inclusif dans le parc social nous rappelle une vérité fondamentale : l'innovation dans ce domaine est moins technique que sociale et organisationnelle.
Nous savons construire, nous connaissons les besoins des publics, mais nous peinons encore à orchestrer efficacement les multiples compétences nécessaires.
Cette capacité d'orchestration émerge comme la nouvelle valeur sur le marché de l'habitat inclusif. Les structures qui sauront la développer - qu'il s'agisse de bailleurs sociaux, d'associations spécialisées ou d'opérateurs dédiés - auront un avantage compétitif décisif.
Un acteur majeur qui a accompagné plusieurs projets résume parfaitement cet enjeu : "On a trop fait croire aux parties prenantes que l'existence d'un cadre défini permettrait à n'importe qui de créer son projet." Cette vision simpliste conduit à de nombreux échecs. La réalité est plus complexe : l'habitat inclusif nécessite une expertise immobilière, financière, sociale et réglementaire que peu d'organisations maîtrisent isolément.
Car au fond, l'enseignement principal des projets franciliens est que l'habitat inclusif réussi n'est pas celui qui propose le bâtiment le plus innovant ou le service le plus sophistiqué, mais celui qui parvient à créer une véritable communauté de vie, où chaque partie prenante trouve sa place et contribue à l'ensemble.
En ce sens, l'habitat inclusif nous rappelle que l'innovation la plus précieuse est celle qui remet l'humain au centre - non pas comme bénéficiaire passif, mais comme acteur à part entière d'un projet collectif.