Le viagra, un traitement préventif contre la maladie d'Alzheimer ?💙
Découvrez les avancées de la recherche médicale sur l'utilisation du viagra pour prévenir la maladie d'Alzheimer
Bonjour, c’est Alexandre de Sweet Home. Longévité est notre newsletter hebdomadaire consacrée à l’actualité de la Silver Économie. Aujourd’hui, je vous présente les travaux de chercheurs qui ont démontré l’efficacité du viagra dans le traitement de la maladie d’Alzheimer.
Cette découverte édifiant passée inaperçue en France a suscité quelques articles fort intéressants au début du mois de décembre 2021. Je vous en livre une synthèse.
A l’origine, un groupe de scientifique décide de chercher un remède à Alzheimer, mais au lieu de partir d’une feuille blanche, ils se penchent sur l’armoire à pharmacie.
Leur idée : il serait plus simple, rapide et moins coûteux d’utiliser une molécules déjà commercialisée que de développer un médicament qui devra passer par les fourches caudines des autorités sanitaires avant mise sur le marché.
Ils sont donc allés chercher des effets secondaires à des molécules déjà commercialisées pour autre chose.
Malin, n’est-ce pas !
La pilule de l'amour 💊
Le Viagra (sildénafil) est l'un des médicaments les plus connus au monde. Pourtant, l'effet salué du sildénafil sur la dysfonction érectile a été découvert par hasard. À l'origine, le sildénafil a été étudié en tant que médicament candidat pour les douleurs thoraciques d'origine cardiaque, car il agit en relaxant les artères. Il est prescrit pour l'hypertension artérielle pulmonaire.
Cela fait déjà du sildénafil un médicament réutilisé, avant même qu'il ne soit utilisé à une autre fin.
La maladie dont on ne guérit pas
Si le Viagra est une célébrité parmi les médicaments, Alzheimer est une sorte de célébrité parmi les maladies. Elle détient le record du pire rapport entre le montant d'argent dépensé en recherches et la qualité des résultats. Si aucun traitement curatif n’a encore été découvert, plusieurs formules ont un effet calmant sur les troubles des malades.
En France, jusqu’à septembre 2018, 4 molécules étaient prises en charge par la Sécurité sociale :
Donépézil,
Galantamine,
Rivastigmine,
Mémantine.
A l’issue d’une longue bataille politico-juridco-médiatico-économique, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a validé la recommandation formulée par la Haute Autorité de Santé de dérembourser ces médicaments. Une décision controversée que j’analyse dans cet article Sweet Home.
Le recyclage ♻️
Comment réutiliser l'un des milliers de médicaments approuvés sans attendre une découverte fortuite ?
L'équipe de recherche, dirigée par le professeur Feixiong Cheng, du Genomic Medicine Institute de la Cleveland Clinic, a utilisé une méthodologie informatique pour cribler et valider les médicaments approuvés par l’Agence Fédérale du Médicament (Appelée FDA, c’est l’autorité de contrôle qui attribue les autorisations de mise sur le marché aux USA) en tant que thérapies potentielles pour la maladie d'Alzheimer.
Grâce à une analyse à grande échelle d'une base de données de plus de 7 millions de patients, ils ont déterminé que le sildénafil est associé à une incidence réduite de 69 % de la maladie d'Alzheimer, indiquant la nécessité d'essais cliniques de suivi de l'efficacité du médicament chez les patients atteints de la maladie.
Le protocole ⚙️
Les chercheurs ont commencé par analyser l'empreinte génétique de la maladie d'Alzheimer et construire le « réseau » de centaines de gènes et de protéines interconnectés qui sont caractéristiques de la maladie. Cela aurait été impossible sans l'aide d'une puissance de calcul toujours croissante aux côtés d'algorithmes d'IA.
Connaissant les protéines cibles des médicaments existants, les chercheurs ont calculé un score de proximité pour chaque cible. Il mesure sa proximité avec la maladie d'Alzheimer sur le réseau qu'ils ont construit. Après avoir fait cela pour plus de 1 600 médicaments existants approuvés par la FDA, ils ont identifié 66 candidats pour leur expérience.
Pour 21 des 66 médicaments, des preuves de leur efficacité contre la maladie d'Alzheimer existent déjà, et 11 d'entre eux sont en cours d'essais cliniques.
La découverte !
Les chercheurs ont voulu voir si l'utilisation réelle des médicaments sélectionnés était corrélée à la prévalence de la maladie d'Alzheimer.
A cette étape de sélection, deux critères majeurs ont été retenus : le médicament doit pouvoir traverser la barrière hémato-encéphalique, et il doit être suffisamment largement utilisé pour qu'une analyse épidémiologique puisse être réalisée.
Après que les scientifiques eurent analysé les données de plus de 7 millions de personnes bénéficiant d'un régime d'assurance-maladie et d'assurance commerciale, le sildénafil est apparu clairement comme un gagnant : son utilisation était associée à une réduction de 69 % du risque d'Alzheimer.
Une deuxième couche (attention, ça devient technique)
Enfin, les chercheurs ont réalisé une série d'expériences in vitro.
Des cellules dérivées de patients atteints de la maladie d'Alzheimer ont été transformées en cellules souches pluripotentes induites (iPSCs) puis en neurones.
Le groupe traité au sildénafil a démontré une croissance des neurites plus robuste par rapport au groupe témoin.
Le sildénafil a également réduit de manière significative l'accumulation de protéine tau, qui, comme la bêta-amyloïde, est associée à la maladie d'Alzheimer.
Le résultat 🏆
La relation est restée hautement significative même après contrôle de diverses variables confusionnelles. Par exemple, les personnes atteintes de troubles cognitifs et de démence peuvent être moins susceptibles de se voir prescrire du sildénafil, notamment si leur vie sexuelle est moyennement épanouie. Pourtant, après ajustement pour les troubles cognitifs légers, l'association entre le sildénafil et la maladie d'Alzheimer est restée forte.
Le challenger 🥈
Le sildénafil n'était pas le seul médicament significativement associé à la maladie d'Alzheimer dans cette étude. Une autre molécule était la metformine, qui est probablement le médicament le plus prometteur en géroscience aujourd'hui. En effet la metformine fait l’objet d’une étude sur la longévité intitulée TAME qui doit démontrer son impact positif sur le vieillissement cellulaire. L’organisateur de cette étude, l’Afar cherche à montrer que le vieillissement est une maladie qu’on peut soigner. Si les chercheurs obtiennent cette reconnaissance, les recherches sur la longévité pourrait bénéficier de financements publics qui leurs sont aujourd’hui inaccessibles.
Concernant Alzheimer, la metformine a obtenu de meilleurs résultats que le sildénafil sur sa proximité avec le réseau Alzheimer, mais sa corrélation réelle avec la maladie était plus faible.
Les chercheurs indiquent une raison probable : la metformine est un médicament antidiabétique, et le diabète est un facteur de risque connu de la maladie d'Alzheimer.
Cela pourrait expliquer pourquoi les personnes sous metformine sont plus susceptibles de développer cette maladie que les personnes sous sildénafil. La metformine fait actuellement l'objet d'essais cliniques pour la maladie d'Alzheimer.
Et donc ...
Comme le notent les chercheurs eux-mêmes, un essai clinique approprié sera nécessaire pour prouver qu'il existe un lien de causalité derrière la corrélation qu'ils ont trouvée.
Au-delà des gros titres, une réalisation encore plus importante pourrait être l'utilisation réussie de méthodes informatiques pour identifier les médicaments candidats via leurs protéines cibles.
La réutilisation de médicaments peut accélérer considérablement la découverte de nouvelles thérapies, car nous disposons déjà de données d'innocuité pour les médicaments approuvés.
En attendant, soyons préventifs
Et en attendant les améliorations, voire l’éradication d’Alzheimer, les spécialistes rappellent l’importance de prendre soin de notre neuroplasticité : stimuler sa mémoire, sortir, être en relation avec au moins trois personnes… Sans oublier l’exercice physique, par exemple marcher au moins trente minutes par jour cinq jours sur sept.
Un remède accessible dès aujourd’hui !
L'impact de la prévention sur la santé des vieux, c'est le sujet de notre rendez-vous de dimanche prochain.
Je vous y présenterai plusieurs études et préconisations réalisées par des chercheurs qui montrent la corrélation entre nos modes de vie tout au long de la vie et une vieillesse sereine - au moins sur le plan de la santé.