J'ai partagé ma vision de la Silver économie dans un podcast
Alexandre Faure | Frédérique Aribaud | Mickaël Saillant | Podcast sur la création de valeur sur le marché des seniors | Enregistré le 19.9 à Cannes
Bonjour à tous et bienvenue dans ce podcast en direct du Palais des festivals de Cannes à l'occasion du Festival international Silver Eco 2023.
Nous sommes ici pour parler de la Silver Économie, une filière qui fête aujourd'hui ses 10 ans, et nous allons tenter de comprendre les facteurs clés de succès de ce secteur. Que vous soyez investisseur souhaitant entreprendre sur le marché des seniors. Entrepreneur devant déterminer les bons KPI pour se développer. Ou annonceur avec un portefeuille de marque cherchant à s'adapter au vieillissement de sa clientèle. Nous sommes là pour vous éclairer. J'ai avec moi trois profils complémentaires : Michaël Saillant d'Apolean, Alexandre Faure de Sweet Home et Frédérique Aribaud de Big Silver.
Bonjour à vous trois.
Contextualisation
Le 19 septembre dernier, j’ai participé à un podcast à trois voix avec deux professionnels dont j’admire le travail et l’expertise :
Mickaël Saillant, fondateur et dirigeant d’Apolean (ex-France Adresses) est un spécialiste du marketing direct et du marketing tout court.
Frédérique Aribaud est publicitaire pour l’agence Big Silver (ex-Senior Agency). Avec son associé Jean-Paul Treguer, elle a coécrit un livre sur le marketing des seniors (Le Silver Marketing).
On s’entend bien, comme vous pourrez le constater dans ce podcast, non seulement parce que nous sommes complémentaires, mais aussi parce que nous avons tous les trois le même genre de franc-parler, la même allergie pour la langue de bois.
Aujourd’hui, je vous offre l’opportunité de découvrir nos échanges soit en podcast sur Spotify, soit dans la version Youtube (mais sans image, c’est juste le son diffusé sur Youtube), soit en version texte quasi-intégral (j’ai juste édité en marge, ajouté quelques liens).
Podcast Silver Eco avec Mickaël, Frédérique et Alexandre : le verbatim complet
Animatrice
Afin que nous comprenions rapidement vos rôles et positions respectifs, un projet ou un produit peut passer entre vos mains, mais pas au même moment. Mickaël Saillant, pourriez-vous nous l'expliquer brièvement, s'il vous plaît ?
Mickaël Saillant
Nous sommes réunis ici tous les trois car nous pouvons être complémentaires sur le marché de la Silver Economie. Si nous prenons nos trois spécialités, il y a Alexandre Faure chez Sweet Home, qui se concentre sur le développement du secteur de la Silver Economie, en le cartographiant et en aidant les entrepreneurs à trouver leur place sur le marché. Il identifie également les concurrents potentiels et les innovations qui pourraient concurrencer l’activité de ses clients.
Frédérique Aribaud de chez Big Silver se concentre plutôt sur les médias, en utilisant principalement la télévision et le numérique pour promouvoir les marques auprès du grand public.
Chez Apolean, nous sommes une agence marketing qui travaille depuis longtemps dans la création, les données et les médias, tant sur le support papier que numérique. Nous utilisons tous les dispositifs disponibles pour vendre et fidéliser les clients seniors au profit des marques.
Animatrice
Frédérique, pouvez-vous présenter votre rôle dans ce processus ?
Frédérique Aribaud
Je travaille pour une agence de publicité. La publicité consiste à faire connaître une marque, à la faire aimer et à la faire acheter. L'objectif de la publicité est de vendre. Même si les créations et les innovations sont passionnantes, le but est de gagner sa vie et surtout de répondre à un besoin.
Je ne travaille pas sur le besoin ou sur l'offre elle-même. Cela relève davantage du marketing, des équipes internes des annonceurs, des marques ou des cabinets spécialisés.
J’interviens à la fin de la chaîne, lorsque nous devons faire connaître la marque et la faire aimer.
Je travaille à la fois sur la planification des médias, en activant les leviers sur les médias principaux, en ligne ou hors ligne, et en déterminant les différentes cibles seniors. Ensuite, bien sûr, je m'occupe de la création, en développant les messages publicitaires et les slogans. Comment mettre tout cela en œuvre ?
Et chez nous, nous avons des personnes spécialisées dans la création, telles que des directeurs artistiques, des concepteurs et des rédacteurs, chargées de concevoir des messages.
Animatrice
Merci beaucoup. Alexandre Faure, quel est votre rôle dans ce cycle ?
Alexandre Faure
Merci. Merci à Mickaël d'avoir donné un petit avant-goût de ce que je fais. Pour ma part, j'ai un travail en amont de l'activité de Mickaël et de Frédérique. Je vais aider les entreprises à se positionner. Mon travail se divise en trois piliers.
Je réalise une veille sur l'offre et la demande du marché. J'analyse les environnements politiques et sociaux afin d'avoir une vision d'ensemble plutôt qu'une vision centrée uniquement sur le produit.
À partir de cette veille, j'effectue des analyses pour construire une réflexion permettant aux entrepreneurs, investisseurs ou pouvoirs publics de comprendre comment ils peuvent s'approprier ou intégrer cette offre, ce service ou cette innovation.
Enfin, j'accompagne des entreprises dans leurs réflexions stratégiques. En intégrant cette réflexion de manière plus spécifique à leur propre situation. Je les aide à identifier les opportunités de développement pour leur projet. Et à s’organiser pour les saisir.
Animatrice
Vous avez donc trois profils bien complémentaires, comme je l'ai mentionné au début du podcast. On va rester un petit peu avec vous, Alexandre Faure. On va commencer par ces investisseurs. Qui sont-ils, ceux qui veulent rentrer sur ce marché ?
Alexandre Faure
Il y a trois typologies d'investisseurs privés intéressés par le marché des seniors.
D'une part des investisseurs qui veulent prendre des participations dans l'entreprise afin de faire une plus-value au moment de la revente de cette participation, ce qu'on appelle du capital-risque. Ces investisseurs vont prendre un risque en injectant du capital en espérant que quand la start-up sera devenue une licorne, ils réaliseront un très gros bénéfice sur la revente des parts.
Une autre typologie d'investisseurs, est plus orientée sur la distribution de dividendes. Ils vont investir dans des entreprises installées et vont compter sur ces entreprises pour faire des ventes, réaliser des bénéfices et verser des dividendes à leurs actionnaires.
Je compléterai le tableau avec les investisseurs institutionnels et les pouvoirs publics, qui sont aujourd'hui des très gros pourvoyeurs de fonds dans la Silver Economie. Ils interviennent au niveau de l'amorçage pour les start-up, en complément ou en substitution aux investisseurs privés.
Animatrice
Merci beaucoup, Alexandre Faure. Je vais donner la parole à Mickaël Saillant pour qu'on fasse ensemble un zoom sur les entrepreneurs. Comme pour Alexandre, quels sont-ils ? Quel est leur profil type, leur portrait-robot ? Et surtout, comment arrivez-vous à déterminer les bons KPI pour les aider à se développer ?
Mickaël Saillant
Les entrepreneurs de la Silver Eco, complétant ainsi ce qu'a dit Alexandre, sont des personnes bienveillantes qui arrivent sur le marché du vieillissement en proposant une offre de produit ou de service qui n'existe pas encore, mais qui souhaitent avant tout répondre à un besoin lié au vieillissement.
C'est là que nous avons besoin d'investisseurs, car il ne suffit pas d'avoir simplement une offre et une bonne idée pour que cela fonctionne. Il faut pouvoir la confronter au marché.
Il est également important de pouvoir rendre compte du marketing de son produit pour voir ce que nous sommes capables de faire. Et c'est là que nous intervenons pour leur donner un coup de main, pour les aider.
Nous les soutenons notamment en termes de marketing, ce que les investisseurs comprennent également bien. En général, les investisseurs expliquent qu'il faut entrer sur le marché par le biais du marketing, de la publicité, et qu'il ne suffit pas d'avoir une bonne idée pour s'imposer sur le marché.
Les indicateurs clés de performance (KPI) vont varier en fonction des produits et de la cible. Comme le soulignait Frédérique, il y a de nombreux seniors, qu'ils vivent à la campagne ou en ville, qu'ils soient jeunes ou plus âgés, qu'ils soient familiarisés avec le numérique ou non.
Ainsi, en fonction du produit, nous adaptons notre approche.
L'investissement dans le marketing est le moteur de la croissance.
Cela passe par deux choses : les tests et les mesures.
Il est toujours très difficile de savoir quel bénéfice client va susciter l'engouement et faire dire aux gens : "Oui, c'est le produit qu'il me faut, c'est le service que je dois acheter". Nous travaillons donc sur la détermination de ces meilleurs bénéfices, puis nous examinons comment transmettre le message, à travers quels canaux et en utilisant quelles données, auprès de quelles cibles. Tout cela est bien compris et soutenu par les investisseurs.
Cela demande du temps, c'est vraiment un investissement, ce que l'entrepreneur initial ne prend pas forcément en compte, car il se concentre énormément sur son produit, ce qui est normal.
Animatrice
Lorsque vous parlez de temps long, sur quelle base approximative sommes-nous, si nous devons faire une moyenne ?
Mickaël Saillant
C'est difficile à dire, mais il faut entre six mois et deux ans pour comprendre un marché, effectuer de nombreux tests et mesures.
En fonction des canaux, le numérique étant un canal très rapide, nous pouvons apprendre rapidement. Si nous devons nous concentrer sur le support papier, le canal est beaucoup plus lent, donc l'apprentissage prendra beaucoup plus de temps.
Il est donc nécessaire d'accepter de prendre du temps, tout comme nous prenons du temps pour créer notre produit, nous devons également prendre du temps pour rencontrer notre marché. Il ne suffit pas de faire appel à une agence de marketing ou de publicité en se disant "Dans six mois, je vais multiplier par 10 et tout sera lancé". Ça ne fonctionne pas comme ça.
Animatrice
Il y a une véritable stratégie à mettre en place et on le comprend en vous écoutant tous les trois. Frédéric Aribaud, nous allons nous intéresser aux annonceurs avec leur portefeuille de marques. Ce portefeuille client, il vieillit et il va falloir s'adapter.
Frédérique Aribaud
Oui, très régulièrement, j'ai des annonceurs qui viennent me voir en disant : "Je veux rajeunir ma marque." Parce que dans le secteur du marketing, il y a souvent des équipes assez jeunes. Et une marque qui s'adresse aux jeunes est toujours plus désirable qu'une marque qui cible les seniors. Cependant, ils se rendent compte que ce sont les seniors qui consomment le plus, qui sont fidèles et qui ont des paniers moyens plus importants, d'après les statistiques.
La clé réside donc dans la création, avec des messages qui ne stigmatisent pas.
La nuance créative est essentielle, ainsi que l'apport d'une agence publicitaire. Notre objectif, en tant qu'équipe publicitaire, est d'aller sur un marché rentable, et les seniors sont une cible opportuniste, fidèle et réactive, contrairement à ce que l'on pourrait penser. Ils ne sont peut-être pas les premiers à adopter les nouveautés, mais ils y réagissent favorablement. Ils apprécient l'innovation.
Par conséquent, il est tout à fait possible de s'adresser aux seniors sans vieillir sa marque, et de cibler à la fois les seniors et les publics plus jeunes avec des messages intergénérationnels, en adaptant le plan média. De nombreuses marques que tout le monde connaît le font. Cela va d'IKEA à la Fnac en passant par Decathlon et Bouygues. Ce sont des marques plutôt intergénérationnelles.
En revanche, il existe des marques générationnelles qui proposent une gamme de produits ou de services spécifiquement dédiés aux seniors. Encore une fois, la nuance est importante en termes de plan média et de création.
Il est tout à fait possible d'avoir un message non stigmatisant en expliquant et en précisant le produit ou le service. L'objectif est de faire de la pédagogie pour que le message soit compris, car parfois la technologie pour la technologie ne transmet pas le bon message.
Il faut rester simple.
Les médias offrent suffisamment de richesse et d'innovation en termes de formats pour pouvoir trouver ceux qui parlent aux seniors, qui soient accessibles et qui remplissent leur rôle, c'est-à-dire transmettre un message compréhensible et susciter l'envie d'achat.
Animatrice
Vous avez dit : "Les seniors ne sont pas une cible, mais des cibles." Michaël a ensuite apporté quelques précisions. Il est vrai qu'il existe différents profils de seniors. Est-ce que vous considérez réellement ces profils comme votre public cible ?
Frédérique Aribaud
Oui, tout à fait. Je suis d'accord et je pense que nous avons tous un discours unanime là-dessus. Tout d'abord, le terme senior ne signifie pas la même chose selon les secteurs d'activité auxquels on se réfère.
Par exemple, dans le secteur de la publicité, il s'agit de personnes de 50 ans et plus. À 50 ans, nous travaillons, nous sommes au sommet de notre carrière et nous ne nous sentons absolument pas senior. Pourtant, dans les plans médias, lorsque je m'adresse aux seniors, je vais chercher des personnes de 50 ans et plus, qui peuvent être des aidants pour les parents dépendants ou pour les petits-enfants.
D'autre part, nous avons aussi des personnes de 80 ans et plus qui n'ont rien à voir avec les personnes de 50 ans, que l'on appelle également seniors. Peut-être les qualifierions-nous de seniors fragiles. Il y a des seniors actifs, des seniors fragiles, avec des plans médias qui n'ont rien à voir en termes de désirs, de besoins, de services et de budget, c'est-à-dire une vie quotidienne, un revenu net qui est totalement différent de celui des personnes de 50 ans et plus.
Donc, bien sûr, lorsque je m'adresse à la cible des seniors, la première question que je pose aux annonceurs est : "Qui avez-vous en tête ?" Et très souvent, j'ai des réponses comme "Non, en fait, nous allons retravailler le ciblage”.
Nous allons donc travailler avec certains outils de ciblage que nous pouvons avoir, parfois avec des partenaires, pour définir les personas1, pour mieux comprendre le qualitatif, le comportemental, etc.
Et une fois que je sais vraiment quelle est ma cible, mon cœur de cible, là, je vais travailler sur la création et le plan média.
Le facteur clé de succès, au-dessus de tout, est la cible.
Quelle est la cible senior ?
Par exemple, nous avons réalisé une segmentation en quatre segments différents, mais il peut y avoir de nombreuses segmentations différentes en fonction des partenaires auxquels vous vous adaptez. Un actif de 50 ans ou un retraité de 60 ans, ou une personne dépendante, n'a absolument pas le même plan média, ni les mêmes indicateurs clés de performance (KPIs).
Animatrice
Merci beaucoup Frédérique. Alexandre Faure de Sweet home, je vous donne la parole, vous vouliez répondre.
Alexandre Faure
Merci beaucoup. Je voulais rebondir sur ce que dit Frédérique. Elle soulève un point capital.
Il y a plusieurs types de senior et leurs besoins sont variés. Ils n’ont pas tous besoin d’aide et d’assistance à la vie quotidienne. Et donc, votre marché n’est jamais composé de l’ensemble de la population senior d’un pays.
La Silver Economie telle qu'elle s'est développée est principalement axée sur l'aide, les soins et la dépendance. Par conséquent, de nombreux projets servent ces besoins sanitaires. Et négligent des besoins plus subjectifs qui ne relèvent pas nécessairement de problèmes de santé ou de dépendance. Souvent, les entrepreneurs identifient un problème à partir de leur vécu.
Ils ont peut-être eu une grand-mère malade ou un parent qui a fini en EHPAD, et ils veulent résoudre ce problème. Cependant, il est crucial de dépasser cette perspective individuelle et de comprendre que les problèmes individuels ne sont pas forcément des problèmes collectifs.
La fin de vie votre grand-mère n'est pas représentative de l'ensemble de la population française en matière de vieillissement.
Vous devez comprendre la demande afin de valider que le problème que vous résolvez concerne suffisamment de personnes pour en faire un marché à part entière.
Animatrice
Mickaël Saillant, vous souhaitez ajouter quelques mots pour Apolean ?
Mickaël Saillant
Tout à fait. Je voulais vous parler à la fois de ce que Frédérique et Alexandre ont dit. Frédérique prend des précautions, ce qui est normal, pour dire qu'il ne faut pas stigmatiser les seniors. C'est l'une des forces de la Silver économie.
Expliquer qu'il y a ce marché formidable des seniors dont nous ferons tous partie demain, et qui ne cessera de croître au cours des 20 prochaines années.
Parler d'un senior n'est pas stigmatisant, c'est juste qu'il a aussi des comportements qui évoluent avec le temps.
Et effectivement, à partir de 50, 55 ans, parce que les enfants quittent la maison, parce qu'on est propriétaire de sa résidence principale, parce qu'il y a les premiers petits-enfants, parce qu'il y a le premier héritage, il y a plein de choses qui entrent en compte. Donc, les marques doivent adapter le parcours client à ces cibles.
Plus un senior avance en âge, plus ce qui l'intéresse, c'est le service, c'est l'attention qu'on lui porte.
C'est formidable parce que nous allons arriver sur un territoire de marques où le service et l'attention que vous apportez, ce que vous valorisez, vont être extrêmement importants pour lui, et cela va influencer le prix.
Il vous sera fidèle.
Aujourd'hui, un senior qui devient client à 60 ou 65 ans a de grandes chances de le rester pendant 20 ans. Actuellement, le taux d'autonomie des 85 ans est très élevé. Seulement 8% des seniors finissent en Ehpad. Donc il reste 92% qui sont autonomes. Peut-être pas complètement, mais en tout cas chez eux et capables de gérer leur budget.
Animatrice
Alors, ma question s'adresse à tous les trois. Elle est très vaste. C'est presque une question philosophique, mais comment pourrait-on intéresser le monde économique, dans son ensemble, à la Silver Economie, c'est-à-dire au marché des 50 ans et plus ? Qui veut essayer de répondre en premier ? Frédérique Aribaud.
Frédérique Aribaud
Oui, je suis prêt à m'y atteler. Chez Big Silver, nous faisons cela depuis près de 20 ans, en évangélisant les équipes au sein des services tels que la R&D, l'innovation et le marketing.
Nous nous concentrons toujours sur les publics seniors et leur potentiel.
Je peux dire, en me basant sur mon expérience, que nous sommes en fin de chaîne. Nous recevons des briefs d'annonceurs qui ont besoin de communiquer. Ce que je constate, c'est que nous recevons de plus en plus de briefs. Cela signifie que notre travail d'évangélisation porte progressivement ses fruits.
Nous recevons des briefs de plus en plus solides et de qualité.
Lorsque je parle de "qualité", cela signifie qu'il y a de réels objectifs et de véritables innovations derrière, avec des budgets investis. Des budgets médias réels sont investis. Il ne s'agit pas simplement de budgets R&D pour effectuer des tests sur un échantillon clé, dans une région clé. Non, ce sont de véritables lancements nationaux.
Des projets où notre objectif est de donner envie et de faire connaître la cible et le potentiel.
Et puis, les annonceurs voient leur clientèle qui vieillit. Ils ont les chiffres des ventes en magasin et observent l'évolution démographique.
A mon niveau, je constate cette évolution et nous disposons de budgets importants, ce qui n'était pas le cas il y a 20 ans. Ces budgets sont désormais plus conséquents, mieux structurés et comportent de véritables enjeux marketing. Il ne s'agit plus simplement d'une petite part du budget marketing 2024.
Animatrice
Qui veut compléter les propos de Frédérique ? Alexandre pour Sweet Home.
Alexandre Faure
Notre action portera ses fruits sur le temps long. Il ne faut pas imaginer qu'en un jour, on passera de zéro à un et que la société ne sera plus du tout âgiste, etc.
La situation actuelle est le résultat d'une construction humaine qui s'est étalée sur des siècles. Les personnes âgées étaient autrefois vénérées pour leur sagesse, mais mises à l'écart lorsqu'elles tombaient malades. Des existences de 80 ou 90 ans étaient exceptionnelles, car les risques d’accidents ou de maladies mortels étaient beaucoup plus fréquents. Et ce sur l’entièreté de l’existence.
Nous avons sécurisé les parcours de vie, ce qui permet d’offrir à une part croissante de citoyens une existence plus longue. C’est une première dans l’histoire de l’humanité. Notre longévité est sans précédent et peut-être n’y sommes-nous pas assez préparés.
Nous devons nous approprier collectivement cette réalité. Devenir des porte-parole. Et rester à l’écoute. Ne pas faire de suppositions. Ne pas penser à la place des autres. Chercher à comprendre avec eux leurs véritables besoins, afin de leur proposer des solutions adaptées. Qui peuvent être des produits, des services, mais aussi des organisations ou des sollicitations.
Nous ne devons pas penser la personne âgée comme un consommateur, mais comme un citoyen.
L’enjeu du siècle, pour moi, c’est l'adaptation de la société au vieillissement, qui est le nom d'une loi votée par le Parlement français en 2015.
La richesse de l'écosystème de la Silver Economie, par rapport à d'autres écosystèmes ou marchés, réside dans le travail conjoint des pouvoirs publics, du monde associatif, du monde entrepreneurial et des différentes parties prenantes qui s'efforcent ensemble d'apporter des réponses.
Pour faire un parallèle, les questions environnementales sont aujourd'hui très présentes, mais cela n'a pas toujours été le cas. Depuis 20 ou 30 ans, des personnes tirent la sonnette d'alarme à ce sujet. Aujourd'hui, c'est devenu une question majeure.
Je souhaite que la question démographique et l'adaptation de la société au vieillissement connaissent la même croissance. Plus le temps passera, plus nous serons témoins de son impact sur l'économie, la société et la cohabitation.
Animatrice
Mickaël Saillant, vous vouliez rebondir ?
Mickaël Saillant
Oui, juste pour compléter ce que vous dit Alexandre, c'est un véritable secteur. La Silver économie n'est pas en marge des autres secteurs, elle n'est pas très différente des autres. Elle peut paraître complexe à lire, car comme Alexandre le mentionne, il y a des acteurs associatifs, des institutions et des acteurs privés. Et ce sont peut-être des univers qui ne sont pas habitués à travailler ensemble, ce qui complique un peu la compréhension du marché.
Cependant, c'est un marché réel avec de vrais besoins qui ne cesseront de croître dans le temps. Par conséquent, les investisseurs et les marques ne peuvent pas l'ignorer. Elles ne peuvent pas passer à côté, car sinon, elles perdront une part importante du marché des adultes de 50 ans et plus. Et lorsque Frédérique parlait des données remontées par GFK, je tiens à souligner que, quel que soit le secteur traditionnel en France, 50% des acheteurs ou plus sont des seniors.
Animatrice
Frédérique Aribaud, Big Silver.
Frédérique Aribaud
Oui, j'avais juste un petit zoom sur la jeune génération également. Tout comme Alexandre parlait de la transition écologique, je pense que la jeune génération peut également véhiculer ce message de réhabilitation des personnes âgées. On le voit à travers certains réseaux sociaux, notamment TikTok, avec un certain nombre de comptes créés par les petits-enfants.
Ce n'est pas seulement dans le but de divertir et de faire des vidéos virales en montrant ma grand-mère en train de cuisiner. En France et aux États-Unis, on voit de véritables comptes de connivence entre les grands-parents et les petits-enfants.
Encore une fois, je trouve qu'ils véhiculent un message positif d'inclusion et d'écoute. Je pense aussi qu'il est important de sensibiliser les jeunes générations, et on peut voir qu'il y a beaucoup d'innovations dans le domaine tout autour de nous.
Il est essentiel d'accompagner à la fois les marques et la nouvelle génération qui deviendront un jour des personnes âgées. Ce sont eux qui investiront du temps, de l'énergie et de l'argent dans les solutions du quotidien pour leurs propres grands-parents ou leurs propres parents. Pour moi, l'évangélisation doit se faire à tous les niveaux.
Animatrice
Terminons avec une question sur "Les erreurs à ne pas commettre" qui propose des idées, des pistes et des erreurs à éviter lorsque l'on veut connaître le succès. Mickaël.
Mickaël Saillant
Une des erreurs les plus fréquemment rencontrées est due à l'accent mis sur la jeunesse dans la création et le marketing, qui pousse à tout prix vers le numérique. Certes, le numérique est important et nous en faisons beaucoup chez Apolean, donc je ne vais pas m'y opposer.
Cependant, nous, qui sommes sur le marché depuis 20 ans, observons que nous sommes passés d'un modèle monocanal à une approche omnicanal pour cibler nos clients. Et maintenant nous revenons au numérique, qui est un modèle monocanal.
Vouloir uniquement passer par le numérique et son site web est très réducteur pour lancer un produit auprès de la cible des seniors. C'est une erreur à éviter.
Animatrice
Frédérique, je vous sens trépigner. Vous vouliez absolument réagir. Les erreurs à ne pas commettre, d'après vous ?
Frédérique Aribaud
Dans mon domaine, dans le domaine de la publicité, il y a déjà une erreur courante. Celle qui consiste à ne pas faire de publicité.
Certains pensent : « Je vais créer mon produit, mon service, il est prêt, j'ai fait mes tests, OK. Mais par contre, je vais d'abord me rémunérer et je ne fais pas de plan média parce que ça va venir tout seul. »
Pour moi, c'est une erreur.
Dès la première année, en tant qu'entrepreneur moi-même, je me suis rendue compte de l'importance d'avoir un plan média. Heureusement que je l'ai fait, sinon je ne serais plus là aujourd'hui. Je n'aurais pas pu vendre mon activité quelques années plus tard. Donc, aussi petit soit-il, je trouve qu'il est important d'aller chercher son marché, d'aller communiquer.
Une autre erreur courante dans mon domaine concerne la créativité.
Certains créent des publicités qui sont complètement en décalage, en pensant que les seniors sont soit très amusants, soit absolument pas amusants. Par conséquent, on crée des publicités soit trop stigmatisantes, c'est-à-dire qu'elles sont un peu rébarbatives, un peu caricaturales, soit elles ne sont pas amusantes du tout.
Mais les seniors ont aussi le sens de l'humour. J'ai réalisé de nombreuses vidéos pour les réseaux sociaux et j'ai pu constater leur réaction immédiate en matière de gestion de communauté.
S'ils n'aimaient pas, ils nous le diraient.
Selon le réseau social et le média sur lequel on travaille, on peut adopter des approches qui partent de la marque, du produit, qui font de la pédagogie, mais qui ne sont pas non plus trop institutionnelles, trop rébarbatives.
Les seniors ont aussi envie de s'amuser. Il faut donc toujours trouver le bon ton. La créativité est assez subtile. Mais je trouve qu'il y a souvent des erreurs, avec des produits ou des services excellents, qui ne touchent pas leur cible parce qu'ils ne sont pas compris. Ou parce qu'ils sont exagérés et on se demande : « Mais où veulent-ils en venir ? ».
Animatrice
Alexandre Faure de Sweet Home peut-être un conseil, une erreur à ne pas commettre, ou en tout cas quelque chose à faire très rapidement pour conclure ce podcast.
Alexandre Faure
L'erreur que je constate souvent, en particulier dans l'univers des start-up accompagnées par des incubateurs généralistes, est de chercher des conseils sur la Silver Economie auprès de personnes qui ne sont pas des spécialistes de la Silver Economie.
Comme nous l'avons vu tout au long de cet échange, il y a des spécificités sur ce marché.
Heureusement, il y a aussi de nombreux acteurs experts dans ce domaine, que ce soit pour accompagner les start-up, réfléchir à des investissements, soutenir des accélérations, etc. Il est important de recevoir des conseils de personnes qui savent, car les conseils généralistes ne sont pas toujours applicables aux spécificités.
Il existe des généralités sur la création d'entreprises, le régime juridique, que peut gérer un avocat compétent, mais il y a des particularités propres à notre écosystème, notamment en ce qui concerne la recherche de partenariats, et il est important de s'entourer de personnes dont c'est le métier.
Animatrice
Trois intervenants. Merci à Alexandre Faure pour son extraordinaire conclusion, à Frédérique Aribaud de Big Silver et à Michael Saillant d'Apolean pour leurs 3 profils très complémentaires sur les enjeux du plus grand marché de consommation aujourd'hui et demain, celui des seniors, avec un visage pluriel comme nous l'avons vu. À bientôt pour un prochain podcast en direct du Festival international Silver & Co 2023, en direct et en public.
Conclusion
Ce podcast vous donne un aperçu assez fidèle du parcours entrepreneurial dans la Silver économie, quand vous vendez un produit ou service en B2C. Cependant, je ne peux pas vous laisser penser que tout se passe aussi simplement dans ce marché. Ce serait un peu facile.
Or si j’insiste sur la spécificité de ce marché dans ma dernière prise de parole, ce n’est pas juste pour vendre ma soupe.
Non, c’est parce que ce parcours entrepreneurial peut se transformer en parcours du combattant.
Or un combattant sans sa boussole est un combattant mort.
Et donc, avant la fin du mois de novembre, je vous partagerai une cartographie sur laquelle je sue sang et eau depuis plusieurs semaines. Une cartographie des acteurs clés de la Silver économie.
Une cartographie de l’écosystème.
Elle sera réservée aux abonnés Premium, mais s’il y a une bonne raison de vous abonner en Premium, c’est l’accès à cette pépite !
En marketing, le persona est le profil du client idéal. Un avatar complet qui permet d’imaginer une campagne publicitaire à partir du profil de consommateur ciblé.