Everybody know's EHPAD
L'atout majeur de l'EHPAD : tout le monde le connaît. Ou croit le connaître.
Bienvenue sur Longévité, la newsletter qui décrypte la Silver économie.
Je reviens aujourd’hui sur une expérience menée pendant l’été 2022. J’ai publié une série de vidéos sur les réseaux sociaux afin de détecter l’appétence des utilisateurs pour les sujets qui nous intéressent.
À travers cette expérience, je voulais diversifier mes canaux de communication, mais surtout mesurer l’intérêt des citoyens pour nos sujets et trouver quels sujets les intéressent le plus.
Je vous raconte donc comment s’est déroulé cette opération et ce qu’elle m’a appris, le principal enseignement étant relatif à la renommée de l’EHPAD. Lire cet essai vous aidera à répondre à LA question.
Comment intéresser mes clients potentiels alors que c’est vachement compliqué de leur expliquer ce que je vends ?
Il y a trois ans exactement, en août 2022, je participe à un challenge consistant à publier une vidéo short (moins de 1mn30) par jour pendant trente jours simultanément sur Tik Tok, Youtube (shorts) et Instagram (reels).
Objectif(s) : Percer. Se constituer une audience. Faire des millions de vues.
La promesse
L’organisateur du challenge, Stan Leloup / Marketing Mania témoigne de son expérience, qui a inspiré cette opération. Quelques semaines plus tôt, il a publié une série de vidéos sur les trois réseaux sociaux. Il constate des écarts entre les réseaux et les audiences. Selon les thèmes, les formats, les durées et le moment où il publie. Mais dans tous les cas, quoiqu’avec des écarts notables, il pense qu’une chaîne cohérente, proposant du contenu pertinent pour une audience définie peut trouver son public. Ce qui se traduit par un nombre significatif d’abonnés et des milliers de vues pour chaque vidéo.
Le projet
Il lance donc ce défi. Développe une mini-formation. Construit un cadre pédagogique. Et invite ses clients à participer. Moyennant 150 € de droit d’entrée.
Pourquoi participer ?
Pour valider ses hypothèses alléchantes avec sa propre audience. Mais surtout de fédérer “une audience qui achète”, afin de lui vendre quelque chose.
Une cinquantaine d’entrepreneurs s’est lancée dans le challenge, se soutenant pendant l’expérience à travers un forum où les participants partageaient leurs succès, leurs doutes, leurs questions.
Profils variés :
Des vidéastes aguerris, déjà connus sur Youtube et qui souhaitaient tester le format court.
Des entrepreneurs qui vendent déjà sur d’autres canaux et souhaitent développer une audience qui vient par la vidéo
Des débutants qui n’ont aucune audience et décident de commencer avec les réseaux sociaux “vidéo”
Dans leur majorité, ces entrepreneurs vendent ou veulent vendre de la formation et du coaching. C’est l’audience principale de Stan Leloup. C’est aussi le business qui convertit le mieux sur Youtube.
Vous faites des vidéos - gratuites - de formation.
Vous développez un programme d’approfondissement payant.
Que vous vendez à partir de vos vidéos gratuites.
Vous constituez une liste de clients qui ont acheté la formation 1.
Vous les stimulez régulièrement pour d’autres formations.
Tout en continuant à publier du contenu gratuit pour renforcer votre notoriété et élargir votre base client sur Youtube.
La méthodo
Point de départ similaire à tout projet qui démarre : zéro notoriété. Aucune audience. Inconnu total. L’influenceur déjà connu ailleurs jouit d’un petit avantage, mais pas si énorme que cela. Le plus avantagé, c’est le créateur de contenu imaginatif qui n’a pas de problèmes pour trouver des idées de sujets.
Parce que, pour sortir une vidéo quotidienne pendant trente jours, l’enjeu, c’est la résilience.
Les résultats du début seront nuls. Les audiences ne répondront pas présent. Et le premier succès notable ne sera pas synonyme de croissance. Il pourra n’être qu’un épiphénomène.
Et donc, sans une motivation et une créativité au taquet, difficile d’aller au bout du challenge. Et de continuer après si les résultats du challenge valident une audience qui pourrait acheter.
Mes forces / mes faiblesses
Côté motivation, résilience et créativité, pas de problèmes de mon côté.
J’écris quotidiennement sur notre sujet de prédilection depuis des années
J’ai une réserve d’idées déjà testées ailleurs à recycler pour une audience qui ne me connaît pas
Le sujet est inexistant sur Tik Tok et Insta, embryonnaire sur Youtube
Ma grosse faiblesse est technique : je ne suis pas doué pour le montage vidéo. Elle est aussi créative : mon média de prédilection, c’est l’écrit. Passer d’un format écrit à un format vidéo engagé en face cam, c’est changer de méthode d’écriture. C’est donc faire un effort pour apprendre ce qui fonctionne et l’ajuster à sa sauce… Ou carrément recopier les recettes qui ont fait leurs preuves.
Toutefois, cette faiblesse est contrebalancée par :
La simplicité du montage sur Tik Tok, rendue possible par des outils intégrés à la plateforme
L’appétence des consommateurs de shorts pour des contenus “bruts”, pas trop montés, pas trop léchés. Les gens aiment les témoignages authentiques, comme je le constaterai pendant le défi.
Le planning
Reste à fixer un planning. Il détaille, pour chaque vidéo, ses caractéristiques formelles. Ce qu’elle raconte et ce qu’elle doit provoquer. L’angle, la tonalité, etc. Ces indicateurs serviront à comprendre ce qui marche pour le répéter dans de nouvelles vidéos.
Et laisser tomber ce qui ne marche pas.
Les vidéos en jaune sont celles dont j’ai sous traité le montage à un pro. J’enregistre la voix, je lui donne le script et il fait un montage d’images externes.
Le résultat n’a pas été probant. Ces vidéos n’ont pas mieux marché. Elles ont même moins bien marché que les face-cam.
La motivation du public
C’est, je pense, le principal enseignement de cet exercice.
Sur ces médias, le principal moteur de la motivation des spectateurs, c’est l’émotion.
Comment les gens consomment-ils ces contenus ?
Regardez les gens qui scrollent sur Insta ou Tik Tok. Le temps qu’ils passent sur une vidéo. Comment leur attention est parfois retenue, un court instant. Et comment ils vont parfois scroller dix, vingt vidéos d’affilée avant de s’arrêter sur une qui les mobilise quelques secondes. Celles qu’ils vont liker, partager. Celles - rarissimes - où ils vont mettre un commentaire.
L’attention.
C’est l’attention que vous devez capter. Que vous devez capturer. Vous devez trouver un moyen de retenir l’attention et de susciter une réaction. Cette réaction aura pour effet de vous ancrer dans la timeline de ce mobinaute. Qu’il like, partage, commente ou s’abonne, il sera à nouveau exposé à votre contenu.
Votre enjeu : mobiliser son attention.
C’était cela, l’enjeu du défi 30 jours : trouver comment mobiliser l’attention d’une “audience qui achète” sur une niche donnée.
J’ai tout essayé
Les shorts “rigolos” (tout dépend de votre sens de l’humour, je ne suis pas Benny Hill)
Les analyses plus sérieuses (chutes, le fléau des vieux)
La vulgarisation (le viager expliqué à mon fils)
L’actualité (sur la suspicion d’échangisme dans un village senior en Floride)
Et enfin, vers la fin, les face cam engagés sur des sujets à fort degré émotionnel.
Et plus particulièrement, deux vidéos sur l’EHPAD, filmés face cam et montées à l’arrache en 5 minutes.
Vivre en Ehpad, c'est le rêve de personne où je raconte l’histoire d’une dame résidant en EHPAD et qui fait sa valise tous les matins en pensant que son fils va venir la chercher pour la ramener chez elle.
Jacques Chirac n'est pas mort à l'Ehpad où, constatant que les célébrités ne meurent pas à l’EHPAD, je m’interroge sur les raisons pour lesquelles les gens qui ne l’ont pas décidé y sont quand même placés.


Pourquoi ces posts ont fonctionné ?
Selon mon analyse, pour 3 raisons :
Ils parlent de l’EHPAD et contrairement au viager, à la Silver économie et aux autres idées proposées par mes premiers shorts, tout le monde connaît l’EHPAD. Si je dis EHPAD, les gens qui visionnent la vidéo comprennent immédiatement de quoi je parle. Même s’ils s’en font une idée qui n’est pas toujours réaliste, ils savent que l’EHPAD, c’est un genre de maison de retraite.
Ils mettent le doigt sur une contradiction, une incohérence entre le désir et la réalité : une personne âgée qui veut quitter l’EHPAD tous les jours et qui y reste, contrainte par sa famille. Des célébrités qui meurent chez elles tandis que les familles “normales” doivent placer leur parent âgé en EHPAD faute d’alternatives évidentes.
Ils créent un clivage émotionnel entre ceux qui ont recours à l’EHPAD et ceux qui ne le font pas… Ou pensent qu’ils ne le feraient pas.
L’analyse des commentaires est, en l’espèce, une mine d’information pour quiconque travaille dans ce secteur ou souhaite le renouveler.
Sur le short “Chirac”, les commentateurs pensent que Chirac et Johnny sont morts chez eux parce qu’ils étaient assez riches pour échapper à l’EPHAD. Je ne détaille pas le contre-argument à cette affirmation. Je ne fais que poser le constat. Si vous développez des alternatives à l’EHPAD, sachez qu’il y a là une audience et un truc à faire !
Un clivage s’est créé dans les commentaires entre ceux qui ne mettraient pas leurs parents à l’EHPAD et ceux qui l’ont fait ou comprennent ceux qui le font.
Pour les premiers, c’est inenvisageable et souvent ils appuient leur argumentaire sur des principes culturels car dans leur pays (d’origine), on ne fait pas ça. Ou sur des convictions d’autant plus fortes qu’elles ne sont pas contraintes par la réalité d’une situation.
Si votre père qui vit seul à 300 km est atteint d’Alzheimer, votre considération des options est bien différente.
Pour les seconds, ayant souvent connaissance d’une situation de ce type, le jugement de valeur est atténué. Oui, dans certains cas, placer un parent à l’EHPAD est la seule possibilité.
Dans la suite de la vidéo Chirac, j’énumère les alternatives connues.
Réactions : ce n’est pas pareil, ce n’est pas possible partout, c’est pas adapté aux gens qui doivent aller en EHPAD, c’est encore plus cher.
Ce que montrent ces réactions c’est que le sujet fait réagir. Que beaucoup de gens ont un avis à donner (2500 commentaires cumulés). Que cet avis est souvent tranché (oui / non - bien / mal - riche / pas riche). Et que la majorité des gens n’a jamais entendu parler des alternatives ou bien en minimise l’impact ou considère que ce ne sont pas de vraies alternatives.
Moralité
L’EHPAD est le mot le plus connu de notre champ lexical.
Parlez d’EHPAD pour engager la conversation, que vous vous positionniez comme alternative à l’EHPAD ou comme solution pour adoucir le séjour en EHPAD.
Ne dénigrez pas l’EHPAD tant que votre interlocuteur n’a pas pris position sur le sujet.
Merci pour ce post très intéressant qui montre que :
- être un créateur de contenu reconnu n’est pas simple
- les sujets “polémiques” sont ceux qui engagent le mieux, d’où une tendance aux contenus outranciers/provocateurs.
Des chefs comme Gregory Sampino l’ont bien démontré
C’est aussi un sujet quand on veut parler de nutrition si tu n’utilises pas le mot « perte de poids » tu attires moins l’attention alors que la prévention et la santé n’est plus une question de poids