Good Boost ou comment transformer les piscines publiques en plateformes d'activité physique adaptée pour seniors
Étude de cas : découvrez comment cette startup britannique a révolutionné la rééducation en contournant les prescripteurs traditionnels
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Je vous parle aujourd’hui de Good Boost, une start-up britannique que j’ai brièvement accompagnée en tant que mentor, entre novembre 2024 et janvier 2025 dans le cadre du programme Birdhouse, un fonds d’investissement et accélérateur Belge qui s’intéresse notamment aux agetech européennes.
Good Boost m’a inspiré à plus d’un titre. Voici une start-up en hyper-croissance (+200% en 2024) qui développe un produit B2B2C qu’elle commercialise via un réseau de prescripteurs qui ne sont ni des soignants, ni des mutuelles, ni des acteurs du médico-social. Elle est portée par un CEO d’un dynamisme rare, Ben Wilkins qui n’a pas créé ce projet en pensant à sa grand-mère, mais en détectant un problème sociétal majeur.
En bref, c’est un projet qui coche toutes les cases et dont je ne pouvais pas ne pas vous parler. À travers mon étude de cas, je vous invite à réfléchir à LA question :
Comment réinventer l'expérience utilisateur d'un service médical contraignant pour en faire une activité désirable tout en maintenant son efficacité thérapeutique ?
Quand l'innovation bouscule les circuits traditionnels du soin
Dans un contexte où 58% des femmes et 51% des hommes de 18 à 64 ans souffrent de troubles musculosquelettiques en France, où les listes d'attente pour les soins de physiothérapie s'allongent et où le personnel soignant se fait rare, une startup britannique a trouvé une solution audacieuse : transformer les piscines publiques en espaces thérapeutiques.
Good Boost1, fondée par Ben Wilkins, ne s'est pas contentée de développer une nouvelle technologie de rééducation en milieu aquatique. L'entreprise a complètement repensé l'écosystème thérapeutique en s'affranchissant des prescripteurs traditionnels et en renversant le paradigme du soin.
Là où la majorité des acteurs de la silver économie s'épuisent à convaincre médecins, pharmaciens et services sociaux, Good Boost a choisi les gestionnaires de piscines publiques comme alliés stratégiques. Plus surprenant encore, l'entreprise a transformé l'exercice thérapeutique, souvent perçu comme une contrainte médicale, en une activité ludique et sociale qui attire naturellement les seniors.
Ce double tour de force mérite qu'on s'y attarde, tant il offre de précieuses leçons aux entrepreneurs et acteurs de la silver économie en France.
Un défi colossal : l'exercice thérapeutique pour une population vieillissante
Le constat alarmant
Les troubles musculosquelettiques (TMS) représentent aujourd'hui la principale cause de handicap chez les seniors et la première source de morbidité professionnelle en Europe. Au Royaume-Uni, ils affectent près de 20 millions de personnes. À l'échelle européenne, ce sont 150 millions d'individus qui en souffrent, pour un coût économique estimé entre 0,5% et 2% du PIB de l'Union Européenne. Mondialement, le chiffre atteint 1,7 milliard de personnes touchées.
En France, la situation n'est guère plus reluisante. Les TMS du dos affectent 47% des femmes et 40% des hommes, tandis que ceux du membre supérieur touchent 30% des femmes et 27% des hommes. Ces pathologies constituent la principale cause de perte de journées de travail dans l'Hexagone.
Face à cette épidémie silencieuse, les systèmes de santé montrent leurs limites. Les délais d'attente pour accéder à un traitement n'ont jamais été aussi longs, et cette inaccessibilité contribue directement à l'aggravation des pathologies.
Les limites des solutions actuelles
Le problème ne se limite pas à la prévalence des TMS. Il réside également dans notre façon de les traiter. Les approches traditionnelles se heurtent à trois obstacles majeurs :
Une pénurie chronique de personnel soignant spécialisé, qui ne permet pas de répondre à la demande croissante.
Des traitements concentrés en milieu médical, souvent perçus comme contraignants et stigmatisants.
L'absence de dimension sociale et communautaire dans la plupart des programmes thérapeutiques, pourtant essentielle à l'adhésion sur le long terme.
Pourtant, la solution est connue et scientifiquement prouvée : l'exercice physique régulier et adapté constitue le traitement le plus efficace pour la majorité des TMS.
Mais comment inciter des millions de personnes à pratiquer ces exercices quand le système de soin est saturé ?
Le paradigme Good Boost : du médical au loisir, du prescrit au choisi
Renverser la logique des lieux de soin
C'est en partant d'un constat statistique que Ben Wilkins et son équipe ont eu leur révélation : 86% des personnes souffrant d'un problème de santé préfèreraient faire leurs exercices dans un lieu de loisir ou communautaire plutôt qu'en milieu médical. Une donnée qui contraste singulièrement avec l'organisation traditionnelle des soins de rééducation.
Face à cette réalité, Good Boost a inversé la perspective : plutôt que d'essayer d'attirer les patients vers des centres médicalisés, pourquoi ne pas transformer les espaces de loisirs déjà existants en lieux thérapeutiques ?
Avec plus de 200 000 salles de sport et 500 000 piscines publiques dans le monde, un réseau immense et sous-exploité s'offrait à eux.
"Notre innovation réside dans cette approche : transformer n'importe quel espace en lieu thérapeutique, plutôt que créer de nouveaux centres spécialisés", explique Ben Wilkins.
Une vision d'autant plus pertinente que 51% des personnes préfèrent recevoir un traitement dans une piscine ou une salle de sport plutôt qu'à l'hôpital, et que 55% des nouvelles inscriptions en salle de sport sont motivées par la gestion d'un problème de santé.
Ci-dessous, l’un des nombreux feedback client proposé par Good Boost sur son site. Il permet de comprendre, par la voix du client, l’enjeu, la solution, sa pertinence… Une mine d’or.
Une technologie qui démocratise l'expertise
Au cœur de cette approche se trouve une solution technologique astucieuse : des tablettes robustes équipées d'une intelligence artificielle capable de générer des programmes d'exercices personnalisés.
Installées au bord des piscines, ces tablettes deviennent le substitut numérique du physiothérapeute, guidant les utilisateurs à travers des séances d'aquathérapie adaptées à leurs besoins spécifiques.
L'aspect communautaire n'a pas été négligé : le système permet d'organiser des séances collectives, créant ainsi une dynamique sociale qui renforce l'adhésion au traitement. "L'aspect social est essentiel pour que ces services soient efficaces sur le long terme", insiste Wilkins. "Nos participants ne viennent pas seulement pour les exercices, mais aussi pour les liens qu'ils tissent avec les autres membres du groupe."
Choisir les bons partenaires : au-delà des prescripteurs traditionnels
L'impasse des prescripteurs habituels
La plupart des innovations dans le domaine de la santé des seniors se heurtent à un obstacle de taille : la difficulté à intégrer les circuits de prescription traditionnels.
Médecins débordés, CCAS aux budgets contraints, mutuelles prudentes... Ces acteurs, bien que légitimes, constituent souvent des goulots d'étranglement pour le déploiement à grande échelle de nouvelles solutions.
Good Boost a délibérément choisi de contourner cette difficulté en ciblant un prescripteur inattendu : les gestionnaires d'infrastructures de loisirs. "Nous avons compris que pour toucher massivement notre public cible, nous devions être présents là où il se trouve naturellement, et non pas l'attendre dans un cabinet médical", explique Ben Wilkins.

Les gestionnaires de piscines comme nouveaux alliés stratégiques
Ce choix stratégique s'est révélé particulièrement judicieux. Les piscines publiques constituent un réseau dense, accessible et présent dans la plupart des communes. Leurs gestionnaires sont constamment à la recherche de nouvelles offres pour attirer et fidéliser leur clientèle, particulièrement en dehors des heures d'affluence.
Good Boost leur propose une solution clé en main : pour un investissement minimal (l'acquisition des tablettes), ils peuvent proposer un service à haute valeur ajoutée qui attire une clientèle nouvelle - les seniors et personnes souffrant de problèmes musculosquelettiques - pendant les heures creuses.
Ce modèle B2B simplifie considérablement le déploiement : au lieu de devoir convaincre des milliers de patients individuels, Good Boost n'a qu'à convaincre quelques centaines de gestionnaires d'infrastructures.
"Notre ambition est de devenir le Zumba de la santé et du bien-être", résume Wilkins, faisant référence à ce programme de fitness présent dans des milliers de salles dans le monde2.
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