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Vous avez aimé Orpéa, vous allez adorer Avec 💚
Les scandales dans le médico-social se suivent et se ressemblent
Vous avez aimé Orpéa ?
Il y a un an, la parution d’une enquête consacrée au groupe d’Ehpad Orpéa a suscité un raz de marée d’indignation. Pris dans une tourmente qu’il n’avait pas assez anticipée, le groupe a été balayé, foulé aux pieds, sanctionné, détesté.
Ce feuilleton politico-médiatique a éveillé ma curiosité.
Non pas sur le fonds, mais sur la forme.
La seule chose qui m’étonne sur le fonds, c’est que cela n’ait pas pété plus tôt, vu le nombre hallucinant de témoignages et reportages qui ont été faits sur le sujet, chaque année depuis des années, sans que rien ne bouge ou presque.
Cependant, on peut reconnaître (et saluer) le travail des lanceurs d’alerte, témoins et acteurs de cette aventure et en même temps s’interroger sur le retentissement médiatique et la mobilisation politique inédite autour de ce scandale.
C’est un droit que je me suis octroyé.
Pourquoi l’Affaire avec un grand A ?
Pourquoi l’affaire Orpéa a-t-elle eu un tel retentissement médiatique, politique et économique ?
Pourquoi cette enquête sur l’Ehpad, qui n’était ni la première, ni la dernière, a-t-elle provoqué un tel raz-de-marée d’indignation sur laquelle des politiques et des syndicats ont surfé pour faire avancer leurs pions ?
Comment un journaliste est-il devenu le preux chevalier
d’une cause qui n’est pas la sienne ?
Un an après les faits, j’ai repris les pièces du dossier et j’ai passé plusieurs jours à enquêter sur les fondements de l’affaire à partir de tout ce que j’ai pu trouver en sources ouvertes1.
Les intérêts croisés.
Les bénéfices de l’opération.
Les marionnettes et les marionnettistes.
Je vous livrerai le fruit de ma réflexion dans un prochain dossier Premium et une conférence organisée par mon ami et confrère Antoine Gérard.
Plus de précisions là-dessus en fin d’article.
Vous allez adorer Avec
En guise d’apéro, j’aimerais faire un parallèle entre l’affaire Orpéa et un autre scandale bien juteux qui remue pas mal de boue.
Un scandale qui a fait quelques fois un titre dans la presse locale, mais ne mobilise aucun parangon de vertu, ne suscite pas l’indignation des médias et ne provoque pas la réunion d’une commission d’enquête parlementaire.
Et vue l’ampleur du scandale, ses ramifications et son ancienneté, il y a de quoi se demander pourquoi.
Ce que je vais faire.
Mais avant d’aborder le pourquoi, prenons connaissance du quoi
Avec brio
Je m’appuie sur un dossier journalistique brillant publié par L’Eclaireur, un média indépendant qui publie un contenu d’excellente qualité, sur Substack. Spécialiste de la région alpine, L’Eclaireur s’est intéressé au groupe Avec en enquêtant sur une opération financière.
Gestionnaire du Groupe Hospitalier Mutualiste de Grenoble (GHM), Avec a essayé de ponctionner 6 millions d’euros dans les fonds du GHM afin de renflouer ses autres établissements. Dénoncée par les syndicats, la manœuvre a été partiellement bloquée par la justice.
Cet événement sulfureux a mis la puce à l’oreille de L’Eclaireur qui s’est penché sur Avec et son mystérieux fondateur - dirigeant - polytechnicien - ami des politiques, Bernard Bensaïd.
Le journal en a fait une impressionnante série d’articles ultra-documentée qui analyse en profondeur le fonctionnement, les dérives et les inquiétants silences politiques autour du Bensaïdgate.
Permettez-moi de vous résumer l’histoire.
Dites-le Avec des fleurs
Le groupe Avec (anciennement Docgestio) propose une offre globale en santé, prévention et médico-social distribuée par 130 organismes répartis sur tout le territoire français.
Le groupe s’est constitué grâce à une stratégie de croissance externe et de reprises d’établissements en difficulté, systématiquement présentés comme des sauvetages.
Mode opératoire
Voici comment cela se déroule :
Un organisme est en cessation des paiements, le juge doit décider de sa liquidation ou désigner un repreneur.
Bernard Bensaïd propose alors une reprise de l’actif et du passif.
Il réorganise l’activité en centralisant les fonctions support (comptabilité, administratif, informatique, etc.) et en refacturant les services aux nouvelles entités sous forme de frais de siège.
Il assure la gestion, sauve l’emploi et maintient l’activité, ce qui fait le bonheur des élus locaux et des autorités administratives locales.
Et donc aujourd’hui, Avec rassemble 130 établissements (en grande partie associatifs ou mutualistes) qui ont deux points communs :
Ils sont dirigés, présidés et gérés par Bernard Bensaïd.
Ils ont été intégrés à Avec grâce à une opération de sauvetage alors qu’ils étaient en difficulté financière.
Tous les acteurs qui connaissent ce groupe et son dirigeant se posent des questions sur cet insolent succès et cette insolente méthode de croissance externe.
Une méthode qui met en exergue la situation dramatique du médico-social et du médical associatif et mutualistes qui ont bien du mal à faire face à des coûts élevés et des ressources inadaptées.
Mais ces opérations de sauvetage sont-elles aussi vertueuses qu’elles le paraissent ?
Rien n’est moins sûr.
Soulevons le capot.
Avec audace
Je vous partage ici l’introduction au dossier que L’Eclaireur consacre à Bernard Bensaïd.
Le groupe Avec, fondé et dirigé par Bernard Bensaïd, n’est pas un groupe au sens du code des impôts. La maison mère du “groupe”, Avec S.A, contrairement à ce que suggère son rapport d’activité 2020, ne contrôle pas directement ou indirectement au moins 50% (ou 95% pour consolider l’impôt sur les sociétés) du capital de l’ensemble des entités présentées comme le composant. Les entités du “groupe” Avec ne sont pas non plus liées contractuellement dans une organisation parapluie du type groupement d’intérêt économique.
Avec est une société anonyme qui ne peut pas avoir de liens capitalistiques avec des mutuelles (qui sont des sociétés de personnes, non pas de capitaux, et n’ont pas de capital social) et encore moins avec des associations (qui n’ont que des membres et pas non plus de capital social). Alors que le secteur à but non lucratif, selon la directrice de la communication d’Avec interrogée par nos soins, représente 80% des activités du “groupe”.
Se dégage comme l’impression que la manière dont est présenté le “groupe” Avec est trompeuse, voire mensongère. Au-delà d’un maquis de sociétés, de mutuelles et d’associations (119 personnes morales pour 380 établissements) dont le seul lien semble être la personne de Bernard Bensaïd (il dirige 94 entreprises et détient 103 mandats), par-delà la présentation de données financières qui n’ont aucune réalité comptable car consolidant les comptes d’entités qui ne peuvent pas l’être, il plane un doute sur la solidité financière de ce baroque édifice.
Les secrétaires généraux des unions départementales de l’Isère de Force ouvrière et de la CGT ont déposé au nom de leur syndicat une plainte au Parquet national financier le 15 juillet dernier pour prise illégale d’intérêt et détournement de fonds publics suite à la modification d’une convention annulée en appel par la justice et à quatre prêts tirés de mars à juillet 2022 sur la trésorerie de l’Union mutualiste pour la gestion du Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble (UMG-GHM) d’un montant de 6 millions d’euros au bénéfice de la société mutualiste Doctocare dont Bernard Bensaïd est le dirigeant.
Motif de ces prêts invoqué devant les représentants des employés du GHM par la directrice des relations sociales d’Avec ? “Payer les salaires des structures médico-sociales du groupe qui avait un problème de trésorerie à ce moment-là”. Ces prêts ont-ils en réalité été consentis à Doctocare, une coquille vide qui n’a aucun employé, aucune activité et ne dispose que de 95 euros de fonds propres, au bénéfice de Avec, une société commerciale ?
Allez plus loin (vous ne le regretterez pas)
Je vous recommande la lecture de tout le dossier pour comprendre quelque chose qui n’est pas courant, mais qui n’est pas non plus complètement inédit, et donc mérite d’être identifié et identifiable.
Pourquoi ?
Parce qu’on ne peut pas d’un côté se plaindre que le médico-social manque de personnel et de l’autre laisser se développer des hydres qui contribuent à sa mauvaise réputation.
Un silence assourdissant
Le dossier ouvert sur l’histoire du GHM se poursuit sur d’autres scandales dont certains sont aussi aux mains de la justice. Il montre des connexions politiques et révèle que les dirigeants au plus haut niveau de l’Etat sont bien informés de ce sujet.
Des documents montrent que les pratiques de Bernard Bensaïd, mis en examen mercredi, ont été signalées à Olivier Véran, alors ministre de la santé, depuis janvier 2021.
Et pourtant, il ne fait pas la Une, ni même les gros titres.
On en parle un peu, mais pas autant que l’affaire Orpéa.
Pourquoi l’un et pas l’autre ?
Des théoriciens du complot auront une réponse déplaisante sur la manipulation des médias et l’omerta politique, mais ce n’est pas ma came.
Moi, j’aime adopter un angle systémique.
Si une affaire a créé un raz de marée et l’autre une tempête dans un évier, les raisons sont explicables… Et donc… réplicables ou évitables.
Si vous comprenez ce qui provoque le scandale Orpéa, vous pouvez démonter le mécanisme et éviter qu’une telle avalanche de merde s’abatte votre organisation.
Deux situations
Dans ces deux affaires, je ne questionne ni le fonds, ni la condamnation, ni les résultats, mais bien les mécanismes.
J’ai consacré plusieurs jours à reconstituer l’affaire Orpéa vue par Victor Castanet.
J’ai analysé les profils des témoins et lanceurs d’alerte.
J’ai étudié comment ils ont été mis en avant pendant la campagne médiatique.
J’ai analysé les résultats de l’opération un an après sa naissance et découvert qui profite de ce scandale, directement ou indirectement.
Je vous expliquerai tout cela dans quelques semaines, non pas dans le but de dévaloriser l’engagement ou la moralité des acteurs, mais de vous aider à éviter (ou anticiper) un tel scandale.
Je partagerai mon analyse dans deux contenus :
Un dossier Longévité Premium publié le 19 avril
Une conférence AgeX à Tours, le 17 avril
Sur ce dernier point, quelques précisions.
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Mon ami Antoine
Antoine Gérard est un brillant expert des vieux dont il a fait son sujet d’analyse et son métier. Fondateur de Briscard, un bureau d’étude spécialisé dans l’analyse comportementale des personnes âgées, il organise au printemps un événement unique en son genre : AgeX.
Pendant une après-midi, une douzaine de speakers (des universitaires et des professionnels, comme moi) partageront leurs idées et leur vision avec une audience constituée de professionnels de notre écosystème.
C’est à Tours et nulle part ailleurs et vous pouvez encore vous inscrire ici :
Bilan et perspectives
Mercredi 29 mars, je vous enverrai un flash spécial où je fais le bilan du trimestre écoulé et quelques annonces tonitruantes sur ce que vous allez découvrir dans Longévité au printemps.
Recherches en sources ouvertes ou Open Source Intelligence (OSINT) : méthode d’investigation et d’enquête réalisée à partir des données accessibles librement sur le web et offline (sites, réseaux sociaux, bases de données, publications officielles, etc.)
Vous avez aimé Orpéa, vous allez adorer Avec 💚
Incroyable cette histoire et super teasing 🙏 ! Hâte d’avoir la suite !