Je rêve d'un monde sans EHPAD
Un monde où ni les familles, ni les médecins n'ont la moindre raison de reléguer leurs proches dans des établissements médicalisés et sécurisés
On est entre nous, vous me connaissez bien, donc je vais y aller sans détour.
Je ne pense pas qu’il soit possible de supprimer les EHPAD tant qu’il y aura dans notre civilisation des gens qui pensent que c’est la meilleure place pour leur proche, leur parent ou leur patient.
Je ne jette pas la pierre aux personnes qui le pensent. Elles n’ont pas le choix. Ou bien, elles pensent qu’elles n’ont pas le choix. Ce qui revient au même. De leur point de vue.
Mon intention est de vous éclairer sur une marge de manœuvre limitée. Les circonstances ne semblent pas offrir d’alternative à l’EHPAD.
Soit parce que la personne âgée est très malade.
Soit parce qu’elle vit dans un environnement inadapté.
Soit parce qu’elle n’a pas les moyens de s’organiser, ni personne pour l’aider.
Soit parce que son entourage n’a pas le temps, ni l’envie, ni l’énergie pour s’occuper d’elle.
Soit parce que le médecin décrète qu’il n’y a pas d’autre choix.
Soit parce que personne n’envisage d’alternatives, bien que celles-ci existent.
Soit par un savant cocktail de tout ou partie de ces raisons.
Et donc, si vous désirez ardemment adapter la société au vieillissement, votre obsession doit être de lutter contre tout ou partie de ces raisons. C’est à ce prix que nous ferons disparaître le besoin. Et donc, que nous ferons disparaître la raison d’être des EHPAD. Et donc, la nécessité de ces établissements.
Qu’est-ce qui me chiffonne ?
Le sujet n’est pas neuf pour moi. C’est l’actualité qui m’a fait sortir de mes gonds. Entre le dépôt de bilan d’une enseigne possédant 53 établissements1, une tribune sur les lieux de vie2, des sociétés à mission qui publient leur rapport3 et la loi sur l’accueil des animaux4…
J’ai l’impression qu’on continue à ne pas voir où se situe le problème.
Qu’on continue à ne pas voir comment ces établissements vont évoluer.
Qu’on continue à faire la promotion d’un modèle éculé plutôt que ses alternatives.
Soyons honnêtes. Si les gens ne veulent pas de l’EHPAD, c’est pas en repeignant les couloirs, en mettant des autocollants sur les portes et en laissant entrer les chats qu’on va changer quoi que ce soit au problème.
Alors oui, on ne pourra pas jeter bébé avec l’eau du bain. On ne pourra pas effacer 350 ans d’histoire de relégation institutionnalisée5 d’un trait de plume…
Mais il serait temps d’avoir un peu de suite dans les idées et de construire un autre avenir.
Amorcer le changement nécessaire pour que l’EHPAD ne soit plus l’aboutissement inévitable du parcours résidentiel.
Et donc, solution(s) ?
Comme je vous l’ai écrit au début du précédent paragraphe, le sujet me turlupine depuis des années. C’est même, je pense, la question qui m’a mis le pied à l’étrier en 20176.
J’avais déjà cherché une solution à ce problème dans un dossier paru au moment de la sortie des Fossoyeurs. Avec un titre qui avait fait réagir… À moins que ce soit l’illustration ?
Je viens de le relire et j’étais à peu près autant en forme qu’à l’heure où je vous écris ces mots. Donc, je vous encourage à le lire en entier. Mais si vous n’avez pas le temps, la synthèse de ce dossier, c’est que la solution au problème ne réside pas dans l’organisation de l’EHPAD, mais dans sa place dans la société.
J’écris :
L’Ehpad existera tant que nous n’aurons pas découvert un remède à toutes les maladies chroniques, aux troubles cognitifs et aux maux qui justifient une admission en Ehpad.
Je m’appuie sur une théorie selon laquelle l’EHPAD va se spécialiser dans la grande dépendance et donc adapter son offre en conséquence. Si vous souhaitez aller plus loin sur ce point, je vous ai mis des informations détaillées en annexe7.
Et je conclus:
L’enjeu n’est pas de faciliter le maintien à domicile des GIR 1, il est :
De faire en sorte que moins de personnes deviennent GIR 1, en agissant de manière préventive sur les maladies chroniques (en attendant qu’on ait appris à les guérir)
D’imaginer des dispositifs qui rendront cette hypothèse plausible sans recourir massivement à de la main d’œuvre que nous ne savons pas recruter.
Et donc, si la solution n’est pas dans l’EHPAD, où se situe-t-elle ?
Elle se situe dans un changement de paradigme. Nous devons accepter que l’augmentation de la durée de vie humaine s’accompagne d’une refonte de nos parcours de vie.
Et je peux l’affirmer avec l’aplomb qui me caractérise, car je ne suis pas le seul à l’écrire. En outre, les autres personnes qui l’écrivent ont beaucoup, beaucoup, beaucoup creusé la question. Et justement - les choses sont bien faites - l’un de ces experts vient de sortir un livre consacré au sujet. Dont je vous propose une petite étude.
Rencontre avec le Pr Andrew Scott
Je vous invite à découvrir l’analyse d’un livre du Pr Andrew Scott paru le mois dernier au Royaume-Uni. Scott auteur est économiste. Son obsession : l’adaptation de la société au vieillissement. Il pense que cette adaptation doit passer par une redéfinition de nos parcours de vie. Pour une raison bien simple : les parcours actuels ont été pensés pour des citoyens qui vivaient moins vieux. Ils ne sont donc pas adaptés à une longévité supérieure à 80 ans.
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